L��gende du poker : " Jack Treetop" Strauss
Cette ann��e, j'ai beaucoup pens�� �� Jack Strauss durant les World Series of Poker. C'est l'un de mes joueurs pr��f��r��s, pas uniquement en raison de son talent �� une table de poker, mais aussi parce que c'��tait un risque-tout. J'ai crois�� tr��s peu de gens comme lui dans ma vie. Le genre de personne �� appuyer chacune de ses paroles par une liasse de billets, m��me si c'est la derni��re qui lui reste.
Aux WSOP, j'ai essay�� de me rem��morer certaines de ses histoires et de jouer comme lui. Mais je me suis vite rendu compte que si le talent ��tait un instrument de musique, Jack poss��derait un magnifique tuba quand j'arriverais �� la table arm�� d'une paire de castagnettes.
Inutile de vous dire que, m��me si sa m��moire m'a inspir��, elle n'a pas suffi �� me faire gagner, et j'ai donc d��cid�� de faire un break pendant ces WSOP pour ��crire quelque chose sur un des joueurs de poker les plus inoubliables, Jack Straus, surnomm�� "Treetop" (Ndt : la cime de l'arbre) en raison de son bon m��tre quatre-vingt-quinze.
Les ann��es texanes de Jack Strauss
Jack Straus ��tait un joueur inv��t��r��. Il pariait sur presque tout, en particulier les ��v��nements sportifs (y compris d'ailleurs ses propres parties de golf), et vivait sa vie comme une aventure. Lorsque je l'ai rencontr�� il y a 25 ans, il avait une barbe poivre-et-sel et des lunettes, et il m'a fait penser �� un professeur de coll��ge. D'ailleurs, Jack a effectivement ��t�� enseignant pendant un temps, apr��s qu'il ait d��croch�� son dipl?me de management dans une universit�� du Texas. Mais cette vie n'��tait pas assez excitante pour lui et, circonstance aggravante, son travail le contraignait �� faire un trait sur ses parties de basket et mangeait m��me sur son temps poker.
N�� en 1930, ayant habit�� �� San Antonio, au Texas, la majeure partie de sa vie, Straus connaissait le coin comme sa poche. Il avait partag�� la route de beaucoup de "pros itin��rants" qui ran?onnaient les tables texanes dans les ann��es 50, et avait gagn�� le respect de beaucoup de joueurs comme Johnny Moss, Doyle Brunson, Amarillo Slim ou Byron "Cowboy" Wolford.
C'est d'ailleurs ? Cowboy ? qui m'a rappel�� ce que Jack lui avait dit un jour, "Quand il s''agit de faire une partie de poker, les probl��mes d'argent n'existent pas. Mais d��s qu'il s'agit du loyer...". Il arrive souvent un moment o�� les gros joueurs se retrouvent sans un kopeck et le Super Bowl de 1970 fut un de ces moments-l�� pour Jack Straus. Il avait racl�� les fonds de tiroir pour parier sur les Kansas City Chiefs, croyant fermement que Lenny Dawson, leur nouveau quarterback, allait mener son ��quipe �� la victoire. Straus ne s'��tait pas tromp�� sur Dawson, qui re?ut au terme de la partie le troph��e du ? most valuable player ?, l'homme du match. Et, comme d'habitude, Jack put ainsi financer de nouvelles parties de poker.
Straus adorait Ernest Hemmingway et ne put r��sister au plaisir de vivre �� son tour quelques une des aventures du grand homme. C'est au cours d'un de ses nombreux safaris en Afrique, au Mozambique exactement, que Jack tua un lion. A partir de ce jour, il ne se d��partit plus jamais de la patte du fier animal, attach��e �� une chaine autour de son cou. Une inscription sous la patte r��sume �� elle seule la vie de jack: ? Plut?t un jour comme un lion qu'un si��cle comme un agneau ?.
"Treetop" �� Las Vegas
Lorsque s'ass��ch��rent les routes du poker au Texas et en Oklahoma, Jack d��m��nagea �� Las Vegas. Bien que victorieux aux tables de cash-games, son style super-agressif ��tait mal calibr�� pour les tournois. Il remporta bien un bracelet aux WSOP de 1973 en deuce to seven, mais les tournois n'��taient pas son truc. Par contre, de tous les joueurs que j'ai c?toy��s en 25 ans, Jack Straus est indubitablement celui qui m'a fait la plus grosse impression en short-handed et en t��te-��-t��te.
J'aimerais pouvoir vous dire que j'ai eu la chance de jouer contre lui, mais il officiait �� des limites tellement plus ��lev��es que les miennes. Je prends ?a comme une b��n��diction pour ma faible bankroll. Jack disait toujours que vous deviez accepter le jeu, et simplement trouver le point d'��quilibre entre votre bankroll et votre temp��rament. Pour Jack, le montant de sa bankroll importait peu. Si une partie lui semblait profitable, il ��tait pr��t �� y miser jusqu'�� son dernier dollar. Apparemment, je ne suis pas fait du m��me bois.
En m'asseyant �� une table de No-Limit $10/$25 dans l'��norme Amazon Room du Rio pendant les WSOP de cette ann��e, j'ai essay�� de me montrer agressif et je me suis souvenu des WSOP 1982 et de leur final hallucinant. C'��tait du Jack Straus d'exception, et ce souvenir m'aida �� rester concentr�� pour produire �� mon tour mon meilleur poker.
La l��gende des WSOP 1982 : "a chip and a chair"
En 1982, Straus ��tait un joueur de high-stakes tr��s respect�� �� Las Vegas et dans le sud des Etats-Unis mais, �� cause de son style agressif, il n'��tait pas tr��s connu ailleurs dans le pays. Comme ses r��sultats en tournoi ��taient modestes, il n'��tait pas vraiment m��diatique. Bien s?r, il faisait les WSOP, mais en fait c'est aux side-games qu'il gagnait son argent.
Comme d'habitude, durant les phases pr��coces du Main Event des World Series de 1982, Straus engagea tous ses jetons au milieu d��s qu'il sentait qu'il avait un edge, qu'il ait effectivement le meilleur jeu ou qu'il sente simplement de la faiblesse chez son adversaire. C'est �� l'issue d'un de ces moves que Jack perdit un pot qui ne lui laissa plus qu'un unique jeton de $500. Mais un jeton et une chaise (Ndt : le c��l��bre aphorisme anglo-saxon ? a chip and a chair ?) ��taient tout ce dont il avait besoin. Sur la main suivante, Jack r��colta les blindes, et �� la main d'apr��s il fit tapis avec ce qui lui restait et doubla son stack. Avant que les joueurs de sa table n'aient eu le temps de r��aliser, Jack avait plus de jetons que n'importe qui d'autre dans le tournoi. Bien s?r, il surv��cut �� la journ��e suivante et finit m��me par s'asseoir �� la table des neuf finalistes.
La table finale ressemblait au who's who des grands du poker: Jack Straus, Dody Roach, A.J. Meyers, Sailor Roberts, Buster Jackson, Carl Cannon, Dewey Tomko, Berry Johnston et Doyle Brunson. Parmi eux il y avait trois bracelets et deux futurs vainqueurs. Et �� la clef, pour la premi��re fois dans l'histoire des WSOP, 1 million de dollars �� gagner.
Jack n'��tait peut-��tre pas le plus grand des joueurs de tournoi, parce qu'il avait du mal �� d��marrer avec juste 10,000 jetons, mais sit?t �� la t��te d'un gros stack il devenait redoutable. Au bout du compte, il ne resta plus que lui et Dewey Tomko pour le t��te-��-t��te final, et vous savez d��j�� �� quel point Jack pouvait ��tre fort �� cet exercice. Tomko est par la suite devenu un immense joueur, mais �� cette ��poque il ��tait clairement domin�� par Jack Straus qui, revenu d'entre les morts avec un seul jeton, remporta les WSOP 1982.
Jack Strauss rejoint le Poker Hall of Fame
Je ne vois rien qui personnifie mieux la vie de Jack que ce tournoi et, malgr�� ma profonde tristesse �� l'annonce de sa mort en 1988, j'eus au moins le r��confort de penser qu'il nous avait quitt�� en se livrant �� son occupation favorite : une partie de poker �� gros enjeux.
Jack Straus a rejoint le Poker Hall of Fame en 1988. Il en faisait d��j�� partie bien avant que la chose ne devienne officielle, et je me sens privil��gi�� de conserver quelques souvenirs personnels d'une vraie l��gende du poker.
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