Rodolphe Tissot : "La Tueuse a divis�� la communaut�� poker"
Joueur passionn�� de poker, Rodolphe Tissot est le r��alisateur de la Tueuse, diffus�� en 2010 sur Arte. Il a accept�� de parler de son film quelques ann��es apr��s, d����voquer les coulisses, mais aussi de raconter son exp��rience de joueur. Action !
Quelle a ��t�� la gen��se du film la Tueuse ?
J��ai commenc�� �� jouer au poker en 1998. J��y ai jou�� activement pendant 10 ans. C'est durant ces ann��es que mon projet de faire un film, avec le poker en toile de fond est n��. A cette ��poque, il existait beaucoup de cercles et les sites internet ��taient encore balbutiants. Au d��part, le personnage principal devait ��tre un homme puis j��ai d��cid�� de choisir plut?t une femme. J��aime les personnages f��minins. Cela permettait aussi d����largir l��int��r��t du public. Cela m��a permis d��ouvrir de nouvelles portes narratives durant l����criture du sc��nario qui a dur�� 3 ans. Arte a ensuite accept�� de financer et diffuser le film.
Ton exp��rience de joueur a vraiment ��t�� le terreau du film, peux-tu nous en parler ?
J��ai commenc�� �� jouer au poker en 1998, c��est-��-dire �� une ��poque o�� ?a restait confidentiel. A la fin des ann��es 1990, je jouais surtout avec des amis et en cercle. Je fr��quentais le CIC (Cercle de l��Industrie et du Commerce), situ�� dans le quartier de l��Op��ra. A cette ��poque, c����tait tr��s difficile de monter ne serait-ce qu��une seule table pour jouer en Cash Game. Souvent, il n��y avait que 3 ou 4 personnes pour jouer au poker. Il m��est m��me arriv�� d����tre seul dans le cercle �� vouloir jouer au poker et de devoir rentrer chez moi. A la fin des ann��es 1990, il n'y avait que tr��s peu de tournois et ils ��taient chers. Puis, j��ai commenc�� �� jouer �� l��Aviation Club de France et au Cercle Wagram.
Tu as aussi v��cu le Boom du poker en France.
J��ai vraiment vu arriver la d��ferlante. La victoire de Chris Moneymaker aux WSOP a jou�� un r?le essentiel. A partir de 2002/2003, de nouveaux joueurs, beaucoup plus jeunes ont commenc�� �� venir dans les cercles. Ils ont bouscul��s les vieux habitu��s. La m��diatisation du poker a entra?n�� un engouement. Le niveau n����tait pas tr��s ��lev�� au d��but des ann��es 2000.
Mon fait d��arme poker est de m����tre qualifi�� grace �� un satellite pour le WPT PCA en 2004 qui se d��roulait sur un bateau en mer des Cara?bes. J��ai jou�� �� la table de Daniel Negreanu et j��ai fini ITM en prenant la 23e place. Gus Hansen a remport�� ce tournoi. Aujourd��hui, je ne joue quasiment plus. Seulement deux �� trois parties par an avec des amis.
Dans quels lieux as-tu tourn�� les sc��nes de cercle ?
Le Cercle de jeu principal avait ��t�� reconstitu�� dans une cit�� universitaire. J��aurai bien aim�� louer un cercle mais c����tait hors de prix �� cette ��poque. Ces ��tablissements marchaient tellement bien.
Il avait aussi une sc��ne dans un petit cercle qui a ��t�� tourn�� dans un lieu �� moiti�� clandestin, qui ��tait bien connu des joueurs de l����poque. Sinon, la plupart des acteurs ont ��t�� s��entra?ner au Cercle Wagram pour s��habituer aux cartes. L��ambiance ��tait assez incroyable. On se serait cru dans un film de Scorsese.
Quelles sont tes r��f��rences en mati��re de poker au cin��ma ?
Le Kid de Cincinnati reste pour moi le meilleur film sur le poker. Il montre bien �� quel point le jeu peut devenir dangereux. Steve McQueen est exceptionnel.
Ensuite Rounders est aussi un bon film mais c��est davantage un film de divertissement. Il a ��t�� important pour moi techniquement, notamment dans la mani��re dont les parties sont film��es.
Manuel B��vand a aussi ��t�� consultant sur ce film ?
Tout �� fait ! Il a m��me jou�� dans le film. J��avais besoin d��un bon connaisseur pour coacher les acteurs et d��avoir un regard ext��rieur. Il me donnait son avis sur la mani��re d��organiser les sc��nes de poker. Il s��occupait de pr��parer les cartes et les jetons. Je n��avais pas le temps de faire ce travail sur le tournage. Je tenais �� ce que les parties soient cr��dibles.
Comment le film a ��t�� accueilli ?
La communaut�� poker fut partag��e. Certains n��ont pas tr��s bien accueilli le film mais je m��en doutais un peu. Si je fais un film sur le pain, la moiti�� des boulangers vont m����crire pour me dire que ce n��est pas comme cela que l��on fait du pain (Rires). Certains joueurs ont ador�� le film mais il y a eu aussi des rageux qui n��ont pas aim��. Les profanes ont plut?t appr��ci�� le film.
L��image du poker qui est renvoy��e n��est pas forcement bonne, l��addiction est au c?ur du film.
Ce n��est pas un film �� charge. C��est l��histoire d��une femme qui vit une addiction mais ce n��est pas un film contre le poker. C��est vrai que j��ai appuy�� l�� o�� ?a fait mal. Certains joueurs auraient aim�� que je montre une image plus ludique du jeu.
Si tu devais r��aliser ce film aujourd��hui, qu��est-ce qui aurait ��t�� diff��rent ?
Le monde du poker a beaucoup chang��. Le film refl��tait une ��poque que j��ai v��cue durant la d��cennie 2000. Le film montre un moment assez court de l��histoire du poker, celui de la d��mocratisation. En 2015, le jeu a ��volu��. Aujourd��hui, les jeunes joueurs ont pris plus de place.
De nombreux cercles ont ferm��. Dans ces lieux, il y avait beaucoup d��argent en jeu et parfois des combines. J��aimais bien cette atmosph��re sulfureuse qui pouvait r��gner dans les cercles. Il y a un peu de nostalgie.
Dans une des sc��nes du film, on peut voir Mathilde qui joue sur internet sur le soft de Party Poker. Peux-tu nous raconter pourquoi ?
En fait, au d��but, pour cette sc��ne nous avions besoin d��une interface de jeu, mais nous n��avions pas les moyens financiers d��en cr��er une, uniquement pour le film. J��ai demand�� �� plusieurs sites de poker de me pr��ter leur interface. Le premier �� avoir ��t�� d��accord fut Gr��gory Chochon, qui travaillait chez Party Poker. Il ��tait tr��s enthousiaste. Il n��y avait aucune contrepartie financi��re. Un mois avant la diffusion du film, de nouveaux dirigeants sont arriv��s chez Party Poker. Eux, ne voulait pas voir figurer leur interface dans le film. Nous avons fait un compromis. Nous avons donc du effacer le nom Party Poker, tout en gardant l��interface.
As-tu d��j�� imagin�� faire une suite �� la Tueuse ?
Oui, d��autant plus que la fin du film est assez ouverte. L��h��ro?ne part �� Londres. On peut imaginer sa vie sur place. J��y ai beaucoup pens�� juste apr��s le film. J����tais dans la dynamique mais plus vraiment maintenant.
Quelle est ton actualit�� aujourd��hui ?
Je suis en plein montage de la Saison 3 d��"Ainsi soient-ils" pour Arte, une s��rie sur le catholicisme. Michel Abecassis y tient un petit r?le d��ailleurs. Le succ��s de la Tueuse m��a ouvert des portes, c��est s?r.
Le film reste disponible en DVD �� la vente. La BA de La Tueuse :