Chronique Kipik poker : �� vaincre sans p��ril....
Je voudrais aujourd'hui parler d'un ph��nom��ne assez courant au poker. Et auquel les joueurs pr��tent trop peu attention : ��tre ? priced in ?. Autrement dit, avoir une cote tellement bonne qu'on ne peut pas abandonner.
Comme dans un film��
Situation typique : le Bouton relance, la Grosse Blinde (BB), shortstack (petit tapis), d��cide d'envoyer tout ce qui lui reste. Si le joueur au Bouton comprend un peu le poker, il va g��n��ralement payer la surelance. Et, bien plus souvent que la BB le voudrait, lui infliger un joli badbeat des familles.
Certes, ?a anime un peu les discussions. Mais, surtout, il s'agit d'un sc��nario ��crit d'avance qui prolonge parfaitement la chronique de la semaine derni��re. La fold equity (FE) existe, et n'existe que, parce qu'un joueur peut se coucher.
Je r��p��te : on a de la fold equity que si notre adversaire peut se coucher. Ce qui entra?ne deux r��flexions :
1/ il faut que la main en face soit assez faible pour que le joueur lache l'affaire. Si votre adversaire a AA, vous pourrez pousser autant de blindes que vous voudrez pr��flop, il ne se couchera jamais (sauf cliquage malencontreux ou intervention maladroite du croupier en live). Votre FE est nulle.
2/ il faut que la cote pour payer soit assez mauvaise pour qu'il pr��f��re cette option. Il s'agit bien d'un choix de votre adversaire. Je n'insisterai pas sur ce point mais plus le joueur est mauvais, plus le faire faire ce choix sera difficile. Pour autant, m��me contre un bon joueur, ce choix n'a parfois rien d'��vident. Ou, plut?t, il est ��vident dans le sens qui vous arrangera le moins
Retour aux notions de base
Prenons l'exemple le plus basique qui soit :
Vous relancez du minimum en Petite Blinde (SB- et, non, ce n'est pas tr��s bien jou��) et le joueur de BB fait tapis pour une blinde (1bb) de plus. M��me sans ante, le pot fait alors 2bb (votre relance) + 3bb (sa surelance) = 5. Vous devez donc payer 1bb pour en gagner 5, soit une cote de 5:1.
M��me s'il vous montre A?A? et que vous avez 7?5?, vous ne pouvez pas passer. Vous allez gagner 17% du temps et payer sera donc rentable (17/83, soit 4,85:1).
J'insiste bien sur le fait qu'il vous montre sa paire d'As. Et que cela ne change absolument rien au fait que vous deviez payer. M��me avec votre maigre 7?5?. La cote est juste suffisante pour que vous le fassiez malgr�� tout.
En remontant un peu le temps et en revenant �� l'instant o�� vous d��cidez de faire une relance minimale avec 7?5?, vous saviez d��j�� �� ce moment que vous deviez payer un ��ventuel tapis pour 1bb de plus et, ce, quelle que soit la main de votre adversaire. Y compris s'il vous montre AA (autrement dit, vous auriez mieux fait de directement mettre en jeu son tapis, des fois que vous ayez une miette de FE en plus��).
Dans cette situation, la relance implique le fait de payer la surelance. Vous ne pouvez jamais passer. Et votre adversaire devra jouer sans aucune FE.
On recommence contre plus gros
Changeons un peu le sc��nario : vous relancez toujours 7?5?, mais pour 3bb. Et votre adversaire fait tapis. Mais pour un montant cette fois plus ? correct ?. Devez-vous toujours payer ? Ou pouvez-vous vous coucher ?
Plusieurs facteurs sont �� prendre en compte : son tapis. Son hand range.
Supposons pour commencer qu'il soit un joueur serr��. Et ne ferait tapis ici qu'avec ses meilleures mains. Disons 5,3% des mains : 88+,AQ+.
La cote de 7?5? contre ces mains est de 25,5% (un peu mieux qu'une fois sur quatre, autrement dit, 3:1). Si la cote pour payer est donc de 3:1 ou plus, il sera rentable de payer.
Vous avez d��j�� investi 3bb. En supposant, pour simplifier, que vous ��tes de Petite Blinde, le pot sera de 3+X (X=tapis de votre adversaire). Et vous devez payer X-3.
On a donc �� r��soudre 3+X=3*(X-3). Autrement dit X=6.
Si votre adversaire a 6bb, et que vous devez donc payer 3bb, payer sera correct. Et se coucher une erreur. Si son tapis est plus gros, payer un joueur aussi serr�� n'a pas d'int��r��t.
Pour autant, ce sc��nario est peu probable. Certes, il existe des joueurs qui resteront aussi serr��s avec seulement une poign��e de blindes. Mais la plupart n'h��sitera pas �� prendre des risques avec des mains bien plus faibles.
Disons donc que la BB n'est pas la pire serrure de la terre et n'h��site pas �� faire tapis avec tous ses As, toutes ses paires, toutes les ? broadway ? (combinaisons de deux cartes au-dessus du Dix). Cela repr��sente un range bien plus ouvert : 27.6%.
Notre petit 7?5? se comporte bien mieux ici avec une ��quit�� de 34%.
Simplifions en disant qu'il va gagner une fois sur trois. Ou, donc, qu'il lui faut une cote de 2:1 pour que payer soit rentable.
Notre ��quation est alors : 3+X=2*(X-3). Et on trouve X=9
Il n'est juste pas possible de relancer 3bb et de se coucher contre un joueur qui fait tapis pour 9bb. Si vous ajoutez des ante, on passe �� 10bb. S'il surelance plus de mains, on augmente encore (contre un joueur tr��s agressif, qui surelancerait par exemple 35% de ses mains, 7?5? va gagner une fois sur deux et on ne peut m��me plus se coucher s'il a 13bb de tapis quand des ante sont en jeu).
Mieux vaut avoir du lourd quand on ne p��se pas assez
Cette cote de 2:1 est tr��s importante au poker. Atteint cette cote, ��norm��ment de mains ne peuvent plus ��tre couch��es. Payer sera rentable beaucoup trop souvent.
Celui qui met son tapis en jeu en donnant une telle cote doit savoir que la r��ponse la plus probable pour son adversaire est le call. Sa fold equity est quasi nulle. Il ne peut rien esp��rer d'autre qu'un call de son adversaire. Et avoir la meilleure main �� l'abattage.
L'exemple pris est peut-��tre tr��s basique. Et le relanceur initial a une des pires poubelles. Une main comme A?8? aurait une ��quit�� de 2,3:1 contre un range de surelance tr��s serr��. Q?10?, 2:1. Serr�� ou pas, 12 ou 13bb ne permettent plus alors d'esp��rer avoir de la FE.
Ceci dit, celui qui a fait la relance initiale doit aussi savoir, avant de faire sa relance, qu'il est condamn�� �� payer le tapis de cet adversaire. Relancer et coucher avec une cote de 2:1, ou plus, est une horreur.
Or, dans la r��alit�� des tournois que nous jouons, on ne cesse de voir des joueurs faire tapis sans fold equity et se plaindre de manquer de chance. Et d'autres relancer pour se coucher ensuite sur une surelance qui ne le permet pas. Toute relance, dans ce genre de situation, implique de payer le tapis. Toute surelance implique qu'on sera pay��. Si vous ne comptez pas payer, ne relancez pas. Si vous ne voulez pas ��tre pay��, ne surelancez pas.
C'est un peu mieux mais c'est pas encore ?a
Examinons comment se comportent quelques mains contre diverses ranges:
A?8? contre 88+,ATs+,KTs+,AQo+ (7%) : 2:1
A?2? contre 77+,A9s+,KTs+,QTs+,AJo+,KQo+ (10%) : mieux que 2:1
2?2? contre 88+,ATs+,KQs+,AQo+ (6%) : 2:1
6?7? contre 88+ATs+,KTs+,QJs+,AJo+,KQo (9%) : 2:1
Q?J? contre 99+,AQs+,AKo (4%) : 2:1
A?Q? contre JJ+,AK (3%) : quasiment 2:1
On pourrait presque continuer �� l'infini tellement les situations o�� l'��quit�� d'une main est sup��rieure ou ��gale �� 2:1 sont nombreuses. Mais le plus important est surtout de retenir que, si on vous offre une telle cote, se coucher sera rarement la meilleure option. Et, inversement, qu'offrir une cote de 2:1 �� son adversaire revient le plus souvent �� l'inviter �� jouer la main. A voir qui sera le plus fort �� l'abattage.
Calculez avant d'agir
A chaque fois que vous envisagez une ligne de conduite o�� la fold equity repr��sente une part de votre b��n��fice esp��r��, v��rifiez bien que vous disposez r��ellement de fold equity. Que votre adversaire puisse coucher une main m��diocre. Et, plus encore, une main moyenne.
Si vous lui offrez du 2:1, ou mieux, il est plus que probable que vous serez pay��. Vous devez donc consid��rer jouer sans fold equity : si vous mettez votre tapis en jeu, vous devrez le faire sur la seule valeur de votre main�� et sans venir vous plaindre si le badbeat est au rendez-vous. M��me le top 4% des mains perd une fois sur trois contre Q?J?. Si votre adversaire avait une cote de 2:1 pour payer avec son Q?J?, il n'a commis aucune erreur quand il trouve deux paire ou une quinte pour battre vos Rois.
En poussant ce raisonnement un peu loin, c'est m��me le joueur au Q?J? qui encaisse un badbeat quand vous retournez K?K?. Sa relance pr��flop est certainement correcte. Son call l'est tout autant. Pas de chance pour lui, vous ��tes ��norme.
A qui la faute ?
La faute, au final, vous incombe de ne pas avoir eu un stack suffisamment gros pour amener votre adversaire �� faire une erreur (et encaisser le badbeat s'il paie quand m��me et chatte). Ou lui laisser une chance de coucher sa main. M��me si, bien ��videmment, vous ��tes ravi de jouer votre paire de Rois contre ce genre de main�� apr��s tout, il aurait tout aussi bien pu avoir A?5? et 33% d'��quit��. Auquel cas, m��me en voyant votre main, son call serait math��matiquement correct avec une cote de 2:1.
C'est une des raisons qui m'ont fait, la semaine derni��re, insister sur l'importance de conserver un tapis aux alentours de 20bb. Tant que vous restez dans cette zone, vous n'offrirez que tr��s rarement une cote satisfaisante �� votre adversaire.
Non seulement vous allez amener les plus mauvais joueurs �� commettre des erreurs. Mais, surtout, vous maximisez votre fold equity en offrant toujours une cote faible. Peu int��ressante. Vous offrez en fait �� l'autre joueur une chance d'abandonner. De ne pas se battre.
? A vaincre sans p��ril, on triomphe sans gloire ?, disait Corneille. Et le bon sens populaire en a fait un proverbe�� que je vous recommande s��rieusement d'enterrer aussi profond que possible. Ni le bon sens populaire, ni Corneille, ne jouaient au poker.
A vaincre sans p��ril, on encaisse des jetons facilement et on reste dans le tournoi. Tout le reste n'est que litt��rature��
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